Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
3 février 2012 5 03 /02 /février /2012 22:35

the-lanskies-romeo-L-qYoAUD.jpeg

 

The Lanskies - Romeo

 

Que se passe-t-il en nous quand on décide d'aimer un morceau de musique ? Quel processus auditif, hormonal, intellectuel se met chez nous en branle pour valider une chanson plutôt qu'une autre ? Suis-je conditionné par mon environnement ? Puis-je m'extraire d'une culture, d'une bibliothèque musicale forgée sur de années ? Et surtout, pourquoi, mais enfin, pourquoi la bombarde ?

 

Toutes ces questions me viennent parfois tard le soir, alors que j'essaye d'en découdre à nouveau avec la première page de La gavotte pour les nuls. Rassurez-vous, loin de moi l'intention de convoquer ici Bourdieu ou Pierre Lemarquis. J'aimerais simplement, avec vous, interroger ce moment où quelque chose en nous dit : tu aimeras cette chanson.

 

Je prendrais pour objet d'étude le morceau Romeo par The Lanskies. C'est le single extrait d'un e.p du même nom, sorti fin 2011. Essayons d'analyser ensemble les raisons qui peuvent pousser un auditeur comme moi à chanter à tue-tête, sous la douche ou en contre-teuf d'un festival interceltique, l'imparable "Well i feel just like Romeo, sitting on the floor, and i'm reading again..." ?

 

-  J'ai été envoûté par la pochette de l'album. En l'occurence, non, puisque que celle-ci me fait irrésistiblement penser aux meilleures productions des visuels pour Calgon.

 

- Je suis normand, comme, en partie, The Lanskies. En l'occurence non, puisque si vous avez été un tant soit peu attentifs depuis le début, je suis breton.

 

- J'aime la profondeur à la fois poétique sensible et métaphysique des paroles. Ben non. Là, non.

 

- Je suis soufflé par l'incroyable originalité de la chanson. Non, toujours pas. Tout le monde aura remarqué les nombreuses similitudes d'un morceau comme Romeo avec le style des Cure. D'ailleurs j'en ai profité pour me replonger avec plaisir dans Boys don't cry, le temps de cette chronique. Et je confime que l'élève ne dépasse pas le maître. Du tout.

 

- Je bénéficie du financement occulte de la municipalité de Caen, des Vieilles Charrues, des Inrockuptibles, qui ont tous les trois contribué à la médiatisation du groupe. Ben merde, dans ce cas, je me suis bien fait avoir. 

 

- En matière de musique, J'ai des goûts de chiottes. Ah oui peut-être. Mais vous seriez gonflés de ne me le confier que maintenant. 

 

Bon, je crois qu'il faut se rendre à l'évidence : il est possible d'aimer, malgré tout ça, une chanson simplement pour sa mélodie, son ambiance, sa bonne humeur, pour son efficacité qui ne prétend rien de plus que de vous faire passer un agréable moment, loin du chant plaintif d'un biniou agonisant sur les dernières mesures d'un récital d'Alan Stivell.

 

Dès lors, opération réussie pour la bande à Lewis Evans. Je crois que Romeo est une bonne façon de passer l'hiver en s'imaginant pouvoir danser en t-shirt dans la rue à 22h00. Oui. Et l'idée vaut même lors d'un fest-noz à Lorient. C'est dire.

 

En lien, le sympathique clip de Romeo, et le morceau dans la playlist Grooveshark.

 

Bon week end à tous !

 

 

 

 

Partager cet article
Repost0
2 février 2012 4 02 /02 /février /2012 12:26

Le-Voyage-dans-la-Lune.jpeg

 

Air - Le voyage dans la lune

 

Je sens qu'avec cette chronique, je ne vais pas me faire que des amis. Parce que je vais dire du bien de la nouvelle livraison du groupe Air, Le voyage dans la lune. Alors avant de commencer, petites précisions : 1. je ne suis pas versaillais. 2. Il m'est souvent arrivé de trouver Air chiant à mourir. 3. Je n'aime pas Alessandro Barrico (comprenne qui pourra...)

 

Je ne vais pas m'appesantir sur l'histoire du groupe : j'imagine que vous connaissez les étapes importantes de la carrière de ce groupe emblématique de la fameuse french touch. Ce qui a surtout ici retenu mon attention, c'est la nature du projet :  proposer une nouvelle bande son au voyage dans la lune de George Méliès. Je dis "nouvelle" parce que l'idée d'associer une musique à un film muet comme celui-ci n'est justement pas nouvelle. Il est possible depuis longtemps de regarder ce trip lunaire accompagné d'une bande son. Il y a des chances, en sollicitant You tube, de tomber sur l'une des multiples illustrations sonores de ce récit qui ne dure en tout et pour tout qu'un quart d'heure.

 

Associer musique et images est une démarche complexe. Et très souvent, quand il s'agit de proposer une ornementation musicale à un film antérieur aux années 30, on tombe dans le mickeymousing. Vous savez, ce procédé qui consiste à ponctuer chaque action par une traduction sonore. L'heure est grave ? Ribambelle de violons dramatisants. Course effrénée dans des ruelles sombres ? Batterie assommante entre charley et grosse caisse. Cette vision d'un simple plaquage musical a heureusement été battue en brèche par des compositeurs talentueux comme George Delerue, Ennio Morricone, ou plus proche de nous, Zbigniew Preisner . Sans parler de tous les groupes (Cinematic orchestra pour L'homme à la caméra de Dziga vertov pour n'en citer qu'un) qui ont su offrir a posteriori une interprétation intelligente de ce que l'image brute leur inspirait, créant des passerelles stimulantes entre anciens et modernes.

 

C'est exactement la démarche de Jean-Benoît Dunckel et Nicolas Godin sur ce nouvel opus. Ils ne se sont pas cachés de méconnaître l'oeuvre de Méliès, comme la plupart d'entre nous :  à peine une image de cette lune éborgnée par le vaisseau conquérant.  Doit-on les blâmer de ne pas avoir poussé plus loin la découverte d'un cinéma balbutiant, certes génial d'inventivités, mais réservé aux curieux du septième art naissant ? Air a opté pour la libre adaptation, à partir d'une matière qui reste la première tentative de récit interplanétaire au cinéma. Et pour des musiciens qui ont travaillé sur des intitulés évocateurs comme Moon Safari ou Lost in translation, ce film de Méliès paraissait un rendez-vous tout tracé.

 

Il me semble que la question est moins de vérifier la plasticité de leur proposition que de savoir si l'album se tient de façon autonome, sans l'apport de l'image. Et comme pour la belle bande son de Virgin Suicides, ou un morceau ravissant comme Alone in Kyoto, Air a ici réussi son pari : incarner musicalement l'esprit d'un film pour en faire une oeuvre à part entière. L'album dans sa durée dépasse de loin les quinze minutes initiales. Et c'est un mélange des genres, une variation inspirée sur le thème du voyage, où l'on peut s'amuser à reconnaître des citations de grands explorateurs : le Dark side of the MOON, Badalamenti (décidement très en vogue en ce moment), et au détour d'un morceau, le clin d'oeil au parcours biologique et imagé d'un right here, right now de Fat boy slim sur Moon fever. Et si ce nouvel album doit trouver une place dans votre itinéraire quotidien, nul doute qu'il s'épanouira au mieux le temps d'une évasion songeuse ou lors d'une errance noctambule.

 

Le cinéma pionnier de George Méliès semble être actuellement en odeur de sainteté. Dernièrement, le grand cinéphile Martin Scorsese redonne vie au cinéaste dans son Hugo Cabret. Mais en réalité, si l'on creuse un peu, on se rend compte que Méliès a toujours été là : il suffit pour s'en convaincre de revoir le clip hommage des Smashing Pumpkins pour le morceau Tonight, tonight, ici en lien. Air ne fait que prolonger la course d'un beau flambeau. Et son bout de chemin est convaincant.

 

Et pour vous faire une idée, deux morceaux issus de l'album. 

 

 

 

    

 

 

 

Air - Seven Stars (ft. Victoria Legrand) by The Soundfull
Air - Astronomic Club by Sr Roboto
Partager cet article
Repost0
1 février 2012 3 01 /02 /février /2012 01:50

nils-Frahm.jpg

 

Nils Frahm - Felt

 

Certains disques sont plus délicats à chroniquer que d'autres. Il y a les incontournables, les chouchous de notre discothèque qu'on ne sait plus comment aborder sans y laisser trop de soi-même. Les improbables, qu'on adore même si l'on ne saurait trop dire pourquoi, tant on en mesure les faiblesses. Et enfin les intouchables, ceux qui vous renvoient à l'impuissance de mettre des mots sur une émotion ressentie. L'album Felt appartient définitivement à cette dernière catégorie. Et compte tenu du genre musical ici magistralement visité par Nils Frahm, l'exercice est pour moi d'autant plus ardu. En parler, c'est me demander de tenir la dragée haute à un astrophysicien. J'aime contempler le ciel la nuit, mais je n'y comprends rien.

 

Nils Frahm est un jeune pianiste berlinois né en 1982, initié très tôt à la pratique de l'instrument par Nahum Brodsky, un ancien élève de Tchaïkovsky. En 2009, il sort un premier album, The Bells, enregistré dans une église. L'inspiration est romantique, et bien que de facture assez traditionnelle, il se dégage de ce premier essai une tension poétique, des harmonies puissantes qui touchent la corde immature de ma sensibilité classique.

 

Parce que voilà : depuis que j'écoute de la musique, les albums où le piano est l'instrument central me paralysent. Dans tous les sens du terme. Le solfège est pour moi un mauvais souvenir, et j'ai souvent eu l'impression de rater l'appréciation d'une oeuvre pour piano parce que je n'avais pas les mots pour qualifier ce que je ressentais. On me parlait de gammes, de touché, de technique et moi j'entendais des ambiances, des colères, des confessions. Et j'ignorais qu'on pouvait marier les deux. J'étais paralysé par cet univers à la fois si codifié et à la fois si fascinant. Plus que tout autre instrument, j'ai toujours été émerveillé par cette relation sensuelle, charnelle, intellectuelle, parfois névrotique qui unit le pianiste à sa palette noire et blanche. Tout autant quand je le regardais jouer que quand j'entendais ce que cette union m'offrait. Mais à chaque fois, il me manquait un je ne sais quoi qui m'aurait permis de dire : je comprends cette oeuvre. J'avais toujours l'impression de rater une subtile clé de lecture, à laquelle seuls les initiés avaient accès. 

 

Et puis un jour, j'ai écouté le Koln Concert de Keith Jarrett. Une amie venait de s'offrir l'album en vinyle, et je lui proposais  de le passer sur ma platine. Poliment certes, mais aussi intrigué. Et elle s'étonnait que je ne connaisse pas l'oeuvre (j'ai appris depuis que c'était la meilleure vente en jazz de tous les temps avec le kind of Blue de Miles Davis...)  Si j'écoutais déjà un peu de jazz à l'époque, c'était plutôt coté cuivres : Coltrane, Getz, Mobley. Et j'avouais bien volontiers ma méconnaissance de l'épisode Jarrett. Ce fut une révélation. Pas immédiate certes : je suis progressivement passé de l'écoute séduite au grand tremblement émotionnel. Peut-être que l'étiquette jazz m'a rassurée, comme si elle me permettait, en mon for intérieur, d'exprimer un avis. Mais ce qui est certain, c'est que je tiens ce concert à Cologne comme l'un des plus grands moments de la musique du XXème siècle. Oui, oui, j'assume. Si je n'ai pas le temps ici de m'étendre sur toute la mythologie passionnante cristallisée autour de l'enregistrement de cet album, j'aimerais au moins pouvoir dire une bonne fois pour toute combien ce disque a changé ma vie, mon expérience de la musique. Le koln concert est une oeuvre incompréhensible et inépuisable. La vérité d'une rencontre belle et compliquée un soir entre un artiste au sommet de son art et un piano mal dégrossi dont on tirera le meilleur. Et dont je me nourris chaque jour. J'imagine parfois que j'en discute avec Nanni Moretti, qui a su brillament offrir une image permanente à cette oeuvre dans son Journal intime. Et surtout, j'interroge depuis ce qui interdirait le Koln concert d'être rangé au rayon musique classique.

 

Mais revenons à Nils Frahm. J'ignore s'il a été inspiré par Keith Jarrett. Je sais que j'ai pu en entendre des réminiscences dans son jeu. Mais il y aussi chez lui du Christopher O'Riley,  autre pianiste qui s'est fait connaître pour ses transpositions au piano des albums de Radiohead. De toute façon, la question n'est pas de savoir à quoi ressemble le Felt de Nils Frahm. Mais juste de tenter l'expérience d'un artiste qui a insisté pour faire entendre son oeuvre de nuit. Parce que ce deuxième album est définitivement une oeuvre nocturne et intimiste. Vous y entendrez les moindres bouleversements du jeu, le souffle de Nils, les effets d'atténuation des notes bricolés par le pianiste pour pouvoir jouer tardivement, et faire entendre les moindres craquements de l'instrument. Et surtout, vous y vérifierez une volonté de mêler son art aux sonorités contemporaines, faites d'aspérités, de silences importants. Et c'est un beau mariage. Selon moi, pas d'autre solution : Felt s'écoute en fin de soirée, au milieu de la nuit, quand vous n'avez plus le choix : dormir ou succomber. Et si vous l'écoutez distraitement en journée, en fond sonore , je ne réponds plus de rien. 

 

Donc demain soir, vous saurez trouver un moment égoïste pour prêter une oreille attentive à ce Felt. Tout du moins, je vous y invite.

 

Pour vous convaincre du talent du garçon, deux extraits en écoute, l'un de l'album The Bells, l'autre de Felt

 

 

 

 

Et pour conclure, l'instant magique de la blogothèque.

 


 

Partager cet article
Repost0
30 janvier 2012 1 30 /01 /janvier /2012 11:46

cabane-blog.jpg

 

 

 

Dans ma cabane, une platine # 1

 

Le mois de janvier se termine. D'abord deux semaines de transition, entre révisions de l'année 2011 et premières découvertes de l'année 2012. Deux dernières semaines prolifiques, chargées de nombreuses sorties, et l'on ne sait plus où donner de l'oreille. Aujourd'hui 30 janvier est une première date notable : livraison des nouveaux albums de Stuck in the sound (pursuit), Léonard Cohen (chronique de Didier Varrod ce matin sur Inter...), Liz Green (excellent, une future chronique envisagée...), Lana Del Rey (que dire de plus...?) et surtout, enfin, l'album de Django Django, que je me suis empressé de télécharger (légalement, eh oui..) aux premières lueurs du jour. Verdict bientôt...

 

Fin du mois, occasion également de vous présenter sur ce blog un rendez-vous  : dans ma cabane une platine

 

Vous qui passez par là, près de mon refuge musical,  peut-être avez-vous entendu via mes fenêtres ouvertes, une mélodie aguicheuse. Une rythmique dansante, une chanson délicate, un hymne fédérateur. Rien ne pourrait me faire davantage plaisir. N'ayez pas peur. Approchez. Dans ma cabane, je vous propose de vous arrêter un instant. D'abord, se délester de son manteau. Accepter le café, la bière ou le verre de vin chaud. Puis, tout en discutant de tout et de rien, s'imprégner de l'ambiance sonore. Ca y est, vous y êtes ? Je vous propose une compilation des morceaux qui ont su touché mon hypophyse musicale. Ceux que j'aimerais partager avec vous si vous daignez rester quelques heures en ma compagnie. Vous y trouverez des titres dont j'ai pu parler lors de ces dernières semaines, des morceaux que je n'ai malheureusement pas eu le temps de commenter et qui m'accompagnent régulièrement, des chansons qui me semblent fondamentales quand on veut envisager sa vie par le filtre magique de la musique. Voilà, vous savez où vous mettez les pieds.

 

Chaque fin de mois, je vous proposerai, via Grooveshark, une sélection de mes coups de coeur musicaux. Ceux qui me connaissent savent mon goût pour la compilation, ma névrose de la sélection contrainte. Dans ma cabane, ce sera une vingtaine de morceaux, savamment choisie tout au long du mois, et que j'envisage comme le podium généreux de mes engouements actuels. Détail important, j'ai veillé à ce que cette proposition soit transposable sur cd. Vous savez, ce support des années 90, battu en brèche depuis des années : je reste convaincu qu'une bonne compilation respecte une limite temporelle. Et les 80 minutes d'un cd me semble une bonne option.

 

Pour cette première tentative, j'ai pioché dans le riche vivier des découvertes que j'ai faites ces derniers mois. Vous y trouverez des titres que j'ai épuisés pendant des heures, ceux qui m'ont touché profondément, les chansons indispensables du mois, les pépites récoltées au fil de mes investigations sur le net. Tout ce que j'aurais pu vous proposer si vous aviez franchi la porte de ma cabane. J'ai essayé de les organiser sensiblement, afin que l'écoute soit convaincante. Et maintenant, j'attends votre réaction. 

 

J'espère que cette compilation saura trouver son auditeur. Parce qu'au delà de la simple confession, je souhaite que cette volonté de résumer mes découvertes musicales soit un signe pour certains d'entre vous. En particulier pour les sujets sensibles. Et ce sera dans ce but que je vous proposerai chaque mois "Dans ma cabane une platine". Comme si j'offrais cette compil à un être cher, que je souhaiterais combler, en l'invitant à oublier ses préoccupations le temps d'une expérience musicale. Dans ma cabane, vous êtes chez vous. Alors, enlevez vos chaussures, servez vous un verre approprié, et profitez de l'instant...

 

En lien, la pochette de la compilation (chaque mois, une photo ad-hoc, pour illustrer l'ambiance de la sélection), et les morceaux organisés via Grooveshark. Lancez la playlist et détendez-vous.

 

Ah, au fait : pour le premier d'entre vous qui commentera cette playlist (via sms, facebook, mail...)  à chaque fin de mois, unique envoi garanti sur cd à votre adresse, avec pochette itou...

 

Bonne soirée !

 

Dans ma cabane une platine # 1

 

1068 david lynch 5


David Lynch

 

 

 

Partager cet article
Repost0
28 janvier 2012 6 28 /01 /janvier /2012 23:11

letta

 

Letta Mbulu - Sings

 

Chère Letta,

 

Je t'écris depuis l'année 2012. Nous sommes en janvier, ici il pleut et il fait froid (j'habite en Bretagne) et je ne te remercierai jamais assez de venir réchauffer mon salon de ta voix brûlante.

 

Tu sais, ce début 2012 n'est guère réjouissant. Passe encore la météo. Mais à l'heure où je t'écris, nous nous apprêtons à élire un nouveau président. Et en ce moment c'est la crise. Le genre morose tu vois : la radio, la télé, internet n'ont que ces mots à la bouche : rigueur, austérité, récession. L'heure est grave quoi. Et encore, je m'estime heureux : le prix des coquillettes n'a pas bougé. 

 

Mais je me sens ridicule : tout à mon apitoiement, j'oublie que ta vie a connu de bien plus grandes souffrances. Toi qui es née à Soweto, l'apartheid dans ta jeunesse t'a appris la soumission involontaire. Elle t'a conduite à l'exil. Tu ne le savais peut-être pas alors, mais ce coup du sort t'a permis de rencontrer des grands de la musique qui, encore aujourd'hui, sont des monstres sacrés : Cannonball Adderley, Harry Belafonte. Et quand je pense qu'Harry est surtout connu chez nous aujourd'hui pour sa chanson Try to remember, bluette devenue rengaine des caféinomanes, je mesure combien nos mondes sont parfois séparés. Quand on sait combien Monsieur Belafonte a oeuvré aux Etats-Unis pour l'égalité des droits civiques, j'en mange mon chapeau carte noire.

 

Mais en fait, je suis certain que tu retiens davantage de lui son Banana Boat chaloupé et ironique. Simplement parce que j'y retrouve tout ton sens de la rythmique, cette façon de poser une voix inouie sur des arrangements tirés au cordeau. Ensuite, je vais être tout à fait honnête avec toi : j'ai découvert tes albums bien après ceux de Marvin, Otis ou Stevie. J'ai secoué la tête sur Mamami  des années après l'écoute d'Al Green. J'ai dansé sur Ade bien après Shaft. Et en méditant sur A song for you de Donny Hatthaway, j'ignorais que Pula Yetla existait. Alors je te dois des excuses. J'ai beau passer tes disques en boucle sur ma platine, je suis toujours travaillé par la culpabilité de ne pas t'avoir découverte plus tôt. Je suis convaincu que ma vie n'en aurait été que plus belle.

 

J'imagine qu'aujourd'hui, tu ne peux pas grand chose pour moi, pour nous. Tu as déjà donné. Pourtant j'ai l'intime conviction que tes chansons seraient aujourd'hui des modèles d'espérance quand on a, comme c'est le cas actuellement, les pieds dans une époque merdique. Et que si un jour, on se décide à écouter ta musique plus attentivement, on verra peut-être fleurir des rues à ton nom, ou des décrets Mbulu. Crois-moi, ce serait la révolution.

 

En attendant, puisque je te tiens, je voudrais d'abord te remercier d'avoir illuminé mon début d'année 2012, quand chacun de tes morceaux finit de me convaincre que la musique essentielle est la chose la moins bien partagée au monde. Où as tu trouvé toute cette science chaleureuse du groove, du jazz, cette démonstration définitive de ce qu'est la soul, ce génie du funk ?


  Ensuite, il paraît que là haut, on réserve une place de choix à celles qui ont comme toi rendu heureux les pieds, les coeurs, et les oreilles. Je sais que Nina Simone et Miriam Makeba y coulent des jours paisibles. Je me demande si Etta James se fait à ses nouveaux appartements. Ici-bas , c'est la crise : si je rêve parfois de vous rencontrer Shirley Bassey, Aretha et toi, ce ne serait sans doute aujourd'hui, rigueur oblige, qu'autour d'un bon café et... d'une assiette de coquillettes.  


Enfin, Je veux te déclarer tout mon amour. Grâce à toi, j'ai des preuves irréfutables que Seal est une vaste blague.

 

Je t'embrasse bien fort. 

 

P.S : Grâce à internet, je peux diffuser ta bonne (parole) musique. Alors si tu veux bien, je partagerais volontiers ce qui suit (voir lecteur Grooveshark également). Et si seulement Tata Francine pouvait t'entendre...

 

 

 

 

Partager cet article
Repost0
26 janvier 2012 4 26 /01 /janvier /2012 15:51

second-tour.jpg

Zebda - Second tour

 

Dix ans. Dix ans sans nouvelles de Zebda depuis l'album Utopie d'occase en 2002. Dix ans pour mesurer le changement du monde, un parcours personnel, l'évolution d'un groupe. Et voilà que sorti de nulle part, en 2012, s'offre à nous un nouvel album du collectif toulousain : Second tour.

 

Pour ma génération, Zebda c'est le Bruit et l'odeur et surtout Essence ordinaire. 1998, c'est la fin de mes années lycée, les soirées stratégiques où l'on écoute Miossec, où l'on danse sur le 666. 667 club de Noir Désir, où l'on s'émeut sur The will to live de Ben Harper, et où l'on se termine sur Mano Solo ou Yann Tiersen, entre autres clichés de l'époque. On ne le savait peut-être pas alors, mais ce que nous offrait Zebda, c'était un rare mélange de musique bouillonnante, métissée qui convoquait aussi bien l'art de la chanson dite à texte que la soul, le rai, le ska, le hip-hop, la rumba, le tango... Fusion des genres qu'on avait rarement entendu dans le paysage musical français, allié à un sens du texte inspiré, engagé, poétique.

 

Oui, parce que Zebda est un groupe infiniment poétique, et c'est sûrement de ce don précieux que le groupe tire son épingle du jeu. Là où des écrivaillons pensent réformer la pensée par des formules frontales et sans imagination, Zebda a toujours su trouver un angle d'attaque doux-amer, où se rencontrent la protestation et le jeu de mots, la revendication et la tendresse. Il faut lire les paroles de Double peine ou Tombés des nues pour s'en convaincre. Je vais tenter une comparaison peut-être saugrenue, mais je trouve le même sens poétique à Zebda et Alain Souchon. Cette qualité d'écrire autour, de faire mouche en ayant l'air de pas y toucher, par la force d'un message pertinent derrière la comptine pour adultes.

 

Sur ce nouvel album, Le théorême du châle en est un bon exemple. Sur un sujet plus que casse gueule, la légitimité du port du voile intégral, ils trouvent les mots pour en interroger les raisons, en dénoncer avec malice l'absurdité. Jamais péremptoires les Zebda : dans chaque chanson, entre les lignes, vous trouverez toujours l'épaisseur d'une réflexion qui avance sans se désigner du doigt. Comme si de rien n'était, ils livrent une parole nuancée, souvent joyeuse et enthousiaste, qui affronte les dérèglements sociaux avec l'oeil aiguisé d'un chanteur de chaabi. au sens le plus noble du terme.

 

Autant le dire tout de suite, Second tour n'atteint pas les sommets funky, soul, arabisants ou latins de la production new-yorkaise d'Essence ordinaire qui reste pour moi le chef d'oeuvre du groupe. L'album n'en est pas moins séduisant, voire sur quelques morceaux complètement enthousiasmant, tant l'énergie de Zebda est communicative. Ils ont toujours ce même sens de la composition, de l'humour, et peut-être, à leur corps défendant, du tube : je promets le même succès au single Le dimanche autour de l'Eglise qu'à celui qu'a rencontré Tomber la chemise. Et quoiqu'en pense le groupe (voir le clin d'oeil sympa dans la vidéo plus bas), cela fait aussi partie de leur talent : savoir proposer un hymne immédiat, aux paroles ajustées, et qui fera danser notre Tata Francine cet été le temps d'une soirée galette-saucisse arrosée de cidre doux.  

 

"Je fais le mix qui dégoute pas du vote" chantait Mouss sur On est chez nous. Aujourd'hui, dans cette période de transition électorale, Zebda peut toujours s'en enorgueillir : réveiller subtilement nos consciences politiques comme on sort délicatement quelqu'un d'un sommeil profond, parce qu'on sait que c'est pour son bien. Tout est question de mesure. Et Zebda est à ce titre un modèle du genre.

 

En lien, le clip du Dimanche autour de l'Eglise, ainsi que le trailer de l'album, potache et sympathique.

 

 

 


 

 

Partager cet article
Repost0
25 janvier 2012 3 25 /01 /janvier /2012 15:35

perfume-genius-all-waters-mp3-perfume-genius--L-9NDJhO.jpeg

 

Perfume Genius - Hood

 

Une des bonnes nouvelles de ce début d'année, c'est l'annonce de la sortie du nouvel album de Perfume Genius, Put your back n 2 it, prévue pour le 20 février.

 

Pour ceux qui n'auraient jamais entendu parler de Mike Andreas, ce jeune homme de Seattle s'est fait connaître en 2010 grâce à un bouleversant premier album intitulé Learning, s'embaumant pour l'occasion d'un nom de scène on ne peut plus pertinent : Perfume Genius.

 

Et du génie, nul doute que le garçon en a à revendre. Mais pas de ce type de génie démonstratif, écrasant, celui qui vous inspire un grand sentiment d'injustice et vous décourage d'égaler le maître un jour. Non, Perfume Genius, c'est plutôt le génie qui fleure bon le bricolage, la rencontre heureuse de ritournelles chantées du bout de la voix et de mélodies cassées, déglinguées, au charme instantané. Finalement un génie encore plus impressionnant, parce qu'il est parfumé d'une sophistication suprême : la simplicité.

 

Ecouter Learning, c'est entrer dans la chambre d'un copain un peu maladroit, un peu dépressif, un peu fébrile, qui se serait installé au piano pour vous faire partager son intimité. Et vous seriez le témoin d'un univers à la mélancolie diffuse, à l'émotion retenue, aux harmonies sensibles qui voilent avec pudeur les tourments du garçon. Voilà, c'est ça : le génie de Mike Andreas, c'est de proposer des chansons qui sentent bon l'authenticité, qui ont l'odeur délicate de la modestie. Et forcément, comme vous avez du nez pour le talent, vous avez envie d'en parler à la terre entière. Ca tombe bien, Learning est un album que l'on offre aux gens qu'on aime et auxquels on souhaite proposer une merveilleuse fragrance. De celles, subtiles et enivrantes, qu'on sent inoubliables. 

 

Autant dire que j'attends avec impatience ce nouvel album. Quelques effluves alléchantes émanent en ce moment d'internet : All Waters (en écoute plus bas et dans le lecteur Grooveshark) et le très court Hood dont le clip laisse plus qu'entrevoir la folie douce et décalée de l'artiste. 

 

 

Perfume Genius - 'All Waters' by The 405

 

Et je ne résiste pas à l'envie de réécouter la sublime chanson Learning, qui introduisait le premier album du même nom  :

 

Learning by Perfume Genius Japan

 

 

 

Partager cet article
Repost0
24 janvier 2012 2 24 /01 /janvier /2012 23:35

lana-del-rey-born-to-die.jpg

 

Lana Del Rey - Born to die

 

J'ai écouté l'album de Lana Del Rey. Il s'appelle Born to die.

 

Le monde est petit : c'est un français qui s'est occupé du remix pour le morceau du même nom : le réalisateur, photographe, illustrateur Woodkid (Yoann Lemoine). L'artiste a fait sensation l'année dernière avec son e.p Iron, et comme monsieur ne se refuse rien, il était en concert hier à la Tour Eiffel, dans le cadre d'une série de prestations itinérantes organisée par le label Noisey. Artiste à suivre en tous les cas.

 

Mais je divague. Revenons à notre sujet : l'album est attendu avec la plus grande impatience, compte tenu du buzz incroyable dont il a profité depuis août dernier. Surmédiatisation comparable, toute proportion gardée, à celle dont avait profité Anna Calvi en janvier 2010 pour son magnifique album éponyme.Tiens d'ailleurs puisqu'on en parle : un an après, pour ceux qui sont tombés comme moi sous le charme de son univers et de ses compositions, je rappelle que les faces B des singles (le Wolf like me des Tv on the Radio, Joan of Arc, la superbe reprise d'Elvis Surrender...) sont écoutables sur son site, ou via Soundcloud.

 

Mais je m'égare. Qu'est-ce que je disais ? Donc oui, Born to die sort en France le 30 Janvier. C'est drôle : comme le premier album de Django Django, dont j'ai dit tout le bien que je pensais ici.  Et comme le nouvel effort des français Stuck in the sound, le prometteur et dansant Pursuit, prévu également pour le 30. Date qui verra aussi paraître le Old ideas d'un certain Leonard Cohen, dont on n'avait plus de nouvelles en studio depuis Dear Heather en 2004. 30 Janvier. Tout comme Chairlift et Zebda. Ah non, mince, ça c'était hier...

 

Mais je digresse. Il semble donc que nous tenons l'album de 2012 qui va sauver l'industrie moribonde du disque. Born to die sera dans toutes les oreilles prochainement. Oui, même Tata Francine l'écoutera, et ça vaut mieux qu'autre chose non ?  La pochette sera placardée sur tous les murs de la capitale, et vous ne pourrez pas y couper. Parlons-en d'ailleurs de cette pochette, assez décevante entre nous soit dit. A part le fait de nous renseigner sur les choix de lingerie de l'artiste, l'esthétique est assez, hum, comment dire, sommaire, non ?  Mais peut-être que je ne comprends rien aux enjeux modernes d'un visuel d'album. Cependant, à ce sujet, je viens de découvrir l'excellent livre de Dominique Dupuis, Rock Vinyls, qui collecte, dans une magnifique iconographie, une série de pochettes emblématiques de l'univers rock. Pour en révéler le sens, les inscrire dans l'histoire de la musique et de ses représentations. Très instructif. Pour en savoir davantage, le lien c'est .   

 

Mais je m'écarte de mon sujet :

 

J'ai écouté l'album de Lana Del Rey. Il s'appelle Born to die

 

 

En guise de liens, d'abord le très beau clip d'Iron par Woodkid, à la fois compositeur, interprète et réalisateur : 

 

 

 

 

 

Ensuite, les faces B d'Anna Calvi :

 

 

 

B-sides by Anna Calvi

 

Le remix de Born to die par Woodkid :

 


Lana Del Rey - Born To Die [Woodkid Remix] by PurplePR

 

Et allez, je ne suis pas chien, le clip du morceau original, à l'esthétique, disons, discutable... Si vous ne l'avez pas encore vu, entendu... 

 


 


Partager cet article
Repost0
21 janvier 2012 6 21 /01 /janvier /2012 21:24

cover-copie-1.jpg

 

 

 

Alabama Shakes - Alabama shakes (E.P)

 

Janis Joplin n'est pas morte. Elle chante I Found you, l'un des quatre titres du e.p d'Alabama Shakes, sous le nouveau nom de Brittany Howard. Et comme disent les jeunes, ça envoie du bois. 

 

Boum. A ce stade, ce n'est plus le bruit de la claque que j'ai prise en écoutant ce mini album, mais plutôt celui du violent uppercut sonore qui m'a laissé tout ébaubi à l'écoute de Hold on, morceau qui entame les hostilités sur cet e.p éponyme. En somme le début d'un monde, excitante promesse d'un album renversant en 2012. Tout en écrivant ça, je me fais d'ailleurs la réflexion que rares sont les morceaux dont je peux retrouver avec une certaine nostalgie les circonstances de la première écoute. Let's Dance en 45 tours sur le pick up familial (le tourne disque hein, pas la voiture), Romeo & Juliet, les écouteurs enfoncés profondément dans les oreilles, lors du retour en car d'un voyage scolaire en Espagne. Seven Nation Army chez le disquaire du coin. Avec à chaque fois cette même émotion : Wou-ah, saperlipopette, le monde entier sait-il que cette chanson existe ? 

 

Je ne sais pas encore si Hold on rejoindra cette catégorie personnelle de morceaux madeleines. Mais ce qui est certain, c'est que je me reverrai longtemps la mine de travers en ce début d'après midi pluvieux (oui, oui, toujours la Bretagne...) traverser mon salon pour écluser un énième café, quand la voix de Brittany Howard s'invita dans mes enceintes, pour vérifier ce qu'elles ont dans le coffre. J'ai d'abord cru à une erreur de lecture. J'avais par erreur laissé trainer Cheap Thrills sur la platine. Puis le doute : Joplin n'avait jamais collaboré avec les Dap Kings ou Creedence. Trois cafés plus tard, je cherchais vainement sur internet la possiblité d'obtenir un t-shirt Alabama Shakes for President.

 

Ce qui est impressionnant à l'écoute de ces quatre titres, c'est le travail sur un son qui semble tout droit issu des années soixante dix, mais qui profiterait des technologies d'enregistrement actuel. Sharon Jones nous avait déjà fait le coup avec 100 days 100 nights (une merveille) ou plus récemment Aloe Blacc avec Good Things (une autre merveille). Et en terme de dévouement absolu au fiévreux modèle soul et habité des 70's, je ne pourrais que comparer la proposition d'Alabama Shakes à cet album magique d'une artiste aujourd'hui malheureusement oubliée : Natalia M. King et son Milagro. La même radicalité, la même urgence de dire la souffrance, l'amour, de livrer une musique brute, sèche et pourtant traversée de part en part par l'âme généreuse et écorchée de l'artiste. Nul doute qu'avec Alabama Shakes vous signez définitivement pour un voyage similaire, et qu'il me tarde de retrouver cette sublime voix feulée, posée sur des arrangements telluriques au moment de la sortie de leur album, prévue pour fin avril.

 

En attendant ce moment, voici le morceau I Found you en écoute. Et Hold On dans le lecteur Grooveshark. L'e.p est disponible en téléchargement sur le site Bandcamp, pour environ trois euros. (le lien c'est ). Et j'avoue être curieux de savoir ce que vous en pensez. En bonus, un extrait d'une session live pour finir de vous convaincre.

 

Moi, je sais ce que je vais écouter demain après midi, quand le la pluie battra au carreau. Et je remercierai alors Alabama Shakes de m'offrir la possibilité de traduire ma haine d'une vie pluvieuse, en musique.

 


 

 

 

 

 


 


I Found You - Alabama Shakes EP by ALABAMA SHAKES

Partager cet article
Repost0
20 janvier 2012 5 20 /01 /janvier /2012 16:52

Treme-Soundtrack.jpg

 

Treme O.S.T (Various artists)

 

En marge des séries américaines produites au kilo et qui abreuvent les écrans de TF1, M6, et consorts, il existe une poignée de propositions ambitieuses qui fait le bonheur de (télé)spectateurs curieux en quête de scénarios plus complexes, plus exigeants. La série Treme fait assurément partie de cette deuxième catégorie.

 

Attention, "complexes et ambitieux" ne veut pas dire chiants comme la pluie (et en tant que breton, je sais de quoi je parle). Simplement cette série, créée par David Simon et Eric Overmyer, partage avec The Wire (des mêmes auteurs) la volonté de proposer un récit dense, ultraréaliste, et somme toute déstabilisant pour tous ceux qui attendent en priorité d'un épisode qu'il lui offre son lot de sensations fortes et de péripéties à la minute. La force d'une série comme The Wire était au contraire de prendre son temps, de flirter parfois avec la monotonie de la vie  pour mieux développer ses personnages, les situations, pour accorder à chaque scène le soin du détail, lui conférant alors une épaisseur inédite dans l'histoire de la série télevisée. Il faut saluer une chaîne comme HBO qui a su donner à The Wire le temps de s'épanouir pour parvenir à un résultat magistral. Patience qui est un suprême luxe dans une industrie soumise à la logique de la rentabilité immédiate.

 

Pari identique pour Treme : Nous quittons les bas quartiers de Baltimore pour rencontrer une Nouvelle Orléans au sortir de la catastrophe Katrina, et la série nous propose de suivre le parcours des résidents de Tremé, dans leur quête pour vivre ou survivre malgré tout, malgré l'ouragan et ses conséquences économiques. Ici pas de pathos, pas d'effets soulignés, comme a pu nous y habituer ailleurs le cinéma américain. Treme est une série véritablement humaniste, souvent drôle et tendre, qui prend le temps d'être au plus proche de ces gens qui ont décidé de rester vivre là bas. Simon et Overmyer ont à nouveau relevé le défi d'un récit sans effet de manche, où le réalisme prime sur le sensationnel.


Pour être tout à fait honnête, ce qui me conduit à vous parler de Treme aujourd'hui n'est pas seulement la grande qualité d'écriture des épisodes. Mais Nouvelle Orléans oblige, la bande originale est à tomber. Là où The Wire distillait un hip-hop de circonstance, Treme offre la possibilité d'une relecture de la musique néo-orléanaise, passée ou actuelle. 

 

C'est ce que j'aime dans les séries d'HBO. Ce soin tout particulier accordé à la bande son. Parce que la musique associée à l'image, quand l'une trouve l'autre, est une expérience intense, mémorable. Pour prendre d'autres exemples issues de séries tout aussi ambitieuses, je garde un souvenir très précis du You can't always get what you want des Stones sur le dernier épisode de la première saison de Californication, du For once in my life de Stevie Wonder dans un épisode d'Entourage, et surtout du sublime Shadarobah de Roy Orbison comme conclusion de la non moins sublime deuxième saison de Mad Men. Autant de séries qui ont comme point commun avec Treme d'offrir un récit de qualité, qui parle à l'intellligence du spectateur.

 

Il y aurait beaucoup de morceaux à mettre en avant dans cette bande originale . On peut y entendre du jazz, du big Band, de la soul, musiques qui, de façon souvent anachronique, dramatisent et rendent sensible la détresse ou l'espoir des victimes de la Nouvelle Orléans. Et c'est une suite de morceaux que l'on peut écouter sans même avoir vu une seule seconde de la série. La qualité des artistes convoqués (entre autres : Steve Earle, McCoy Tiner (ancien partenaire de Coltrane), Elvis Costello, excusez du peu...) justifie à elle seule la démarche, en ce début de week end, de vouloir s'asseoir un verre de vin à la main, dans un canapé moelleux, pour écouter calmement le son de la Nouvelle Orléans.

 

Et si je dois confesser une belle découverte musicale que je dois au premier épisode de Treme, c'est le Buona Sera de Louis Prima. Cela fait partie des moments où j'ai pu me dire : pourquoi n'ai-je pas connu ce terrible morceau avant ?

 

Alors, pour vous faire partager cet émoi qui je l'espère vous convaincra autant que moi, voici l'extrait vidéo du Buona Sera issu de Treme, ainsi que le morceau en lecture seule via Deezer.

 

Bon week end !

 

 

 

 

Partager cet article
Repost0

Présentation

  • : Euphonies
  • : Musiques surtout, d'hier et d'aujourd'hui. Au gré des envies et des découvertes.
  • Contact

Playlist Le Bout du Monde

Recherche

Dans ma cabane une platine

Ebuzzing

http://labs.ebuzzing.fr

En boucles d'oreilles

1. Scott Matthews - Unlearned

2. Har Mar Superstar - Bye, bye 17

3. Junip - Junip

4. Nick Cave & The Bad Seeds - Push the sky away

5. Aline - Regarde le ciel

6. Fauve - e.p

7. Bumpkin Island - ten thousand nights

8. Hot Chip - In Our Heads

9.Bertand Belin - Parcs

10.Stromae - Racine Carrée

Et pour quelques titres de plus...

Suivez-moi sur Spotify

Extension du domaine...

Paperblog