Perfume Genius - No Shape
Le projet Perfume Genius fait partie des entreprises musicales qui ont balisé, encouragé, enthousiasmé ces cinq ans d’écriture critique chez Euphonies. Sur le grand spectre de nos écoutes, de la pop très formatée aux expérimentations audacieuses, le curseur a toujours été fixé sur la volonté d’ouvrir et d’offrir au plus grand nombre une alternative. Défendre certains représentants du mainstream malmenés et en même temps, accompagner les oreilles sur des propositions plus confidentielles, audacieuses, séduisantes. Dès l’album Learning en 2010, Perfume Genius, projet du bouleversant et bouleversé Mike Andreas, nous rappelle combien il est important de partager la musique de ces exclus des grandes ondes, de ces invisibles déclassés, faute de temps ou de clés pour y accéder.
No Shape, (informe, ou par extension inclassable, qui ne se range dans aucune case) est l’expression parfaite pour désigner le quatrième opus de Perfume Genius. L’auteur livre ici une confession dense, sinueuse, parfois exubérante, parfois intimiste, parfois expérimentale, toujours sincère, que ce soit dans l’extravagance ou la sécheresse bricolée. Treize morceaux, treize vérités sur sa fragilité, son homosexualité, mais aussi sa magie sonore. On pense à Sufjian Stevens, à Antony Hegarty, à tous ces artistes qui nous rappellent que si le son est méthodiquement théorisé, il nous échappe toujours la raison d’une émotion auditive, et que le tremblement n’est pas soluble dans la science des tourneurs de page.
Il suffira d’écouter le premier titre, Otherside, pour s’en assurer. Piano, voix toujours fébrile mais plus affirmée, coupures de rythme, voyages sur des territoires inconnus sans perdre sa carte d’identité, Mike Andreas signe sans doute l’un des plus grands albums de 2017.