Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
9 mars 2014 7 09 /03 /mars /2014 19:34

 

Josephine-Foster---Im-a-Dreamer-COVER_hi.jpg

 

 

Josephine Foster - I'm a Dreamer

 

 

L’harmonie en musique signifie l’osmose entre deux sons, c’est à dire une sensation agréable à l’oreille due à la correspondance de deux notes jouées à l’unisson.  Par extension, la vie offre aussi des moments harmonieux, où tout semble concorder dans une belle vibration : une belle lumière, une chaleur douce et un verre de blanc. Le froid dehors, la nuit aussi, mais la bûche qui craque, et un verre de blanc. Dehors le crachin, au petit matin, mais depuis la couette et un…bouquin chouette. Il y a mille occasions de savourer ces petites symétries tranquilles, où tout semble carillonner de concert.

 

Rares cependant sont les moments où la première écoute d’un album nous convainc d’une belle synesthésie chère à Charlie (à répéter dix fois très vite). Et quand cela arrive, l’oreille se dresse, siffle l’autre, et intime à tout le corps le branle-bas d’accord : la détente des muscles, la respiration ralentie, le palpitant au repos. Assonances et allitérations ont trouvé leur équivalent sonore,  l’œuvre se love à l’orée de l’ouïe. Plus de doutes, plus de pluie d’août, les chansons fédèrent au son clair d’un frisson éclair.

 

I’m a Dreamer de Josephine Foster. La symphonie infinie, tout en douceur – bonheur. L’album est un parfum (rime visuelle) qui embaume l’ambiance d’une fragrance toute typée : la complainte du Bayou, écosystème complexe d’où émerge une voix oubliée, rejointe de rigoles au piano, de volutes de saloon, de ces chants polis du désespoir. Lancer le cd, le vinyle pulsatile et l’Amérique authentique s’offre à vous. Celle des complaintes délaissées qui vous saisissent dès Sugarpie I’m not the same. En dix titres, l’américaine offre une poésie légère à prendre très au sérieux. De celles qui saura emplir vos minutes d’évidence d’un supplément d’âme. Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes.

 

I'm a Dreamer :

 

l
Sugarpie I'm not the same  :
Partager cet article
Repost0
5 mars 2014 3 05 /03 /mars /2014 10:11

 

 

 

 

Angel-Olsen-Burn-Your-Fire.jpg

 

 

Angel Olsen - Burn Your Fire For No Witness

 

On m’aurait donc menti. Mais on connaît l’adage qui veut que cette forme impersonnelle rime avec connerie universelle. Les femmes et la musique : cette vaste blague. Et pourquoi pas un homme dans une réunion Tupperware tant qu’on y est ? Il est entendu que depuis que l’homme est homme et que la femme est aux fourneaux, cette descendante d’Eve ou de Lilith n’a rien à faire dans l’ingénieuse cuisine de grands chefs au 23ème chromosome amputé. Regardez plutôt : Mozart, Bach, Presley, Lennon, Hendrix, Albarn, Yorke d’un côté. Segara, Dion, Badi, Lorie, Fabian, Zaz de l’autre. La messe est dite : le sexe faible porte bien son nom sur la gamme en Ut(erus) mineur. Seulement capable de miauler une plainte hystérique au gré de ses humeurs menstruelles. Doit-on supporter cela sous prétexte d’égalité ? Bon d’accord, Hildegarde de Bingen, Edith Piaf, Patti Smith, Janis Joplin, Joni Mitchell, P.J Harvey, Fiona Apple, Beth Gibbons, Feist, Amy Winehouse ont pu, à certains moments, s’extraire de leur névrose parturiente pour trouver par hasard la voie d’une mélodie acceptable sans doute aidées par des génies testostéronés. Mais de là à admettre qu’une femelle entrave quoi que ce soit en matière d’émotions musicales, au chapitre des accords si techniques, au rayon des caisses claires / charley, je veux bien me faire (double) pédale. Parfois, pour détourner l’attention, et atteindre à plusieurs le pouvoir d’un seul homme, elles se réunissent à trois ou quatre. Supremes, Electrelane, Savages, Warpaint, et autant d’ovaires dose. Seules Théodore Paul & Gabriel reconnaissent dès leur nom qu’en matière de succès musical, le tube est forcément phallique.

 

Puisqu’une démonstration vaut un trop long discours, je prendrais pour exemple la délicieuse Angel Olsen, américaine au charmant minois, dont la plastique me convaincrait d’être sourd au pays de trop nombreuses prétendantes : Anna Calvi, Cat Power, Lana Del Rey, Hope Sandoval, Soap & Skin. Parce qu’elle me rappelle une arnaque vieille comme le monde : faire croire qu’un deuxième album comme Burn Your fire For No Witness soit l’œuvre d’une gourgandine rebelle. Soyez raisonnable : n’entendez-vous pas le tremblement d’un Roy Orbison dans Hi-Five ? La superbe masculine d’un Strokes sur Forgiven / Forgotten ? Un telle œuvre maitrisée, incandescente, sublimée ne peut assurément être que le fruit d’un nègre compositeur, foi de Nina Simone. Il y a quelques années déjà, j’avais flairé l’arnaque avec Paula Frazer, avec laquelle Angel Olsen partage de suspectes harmonies : tant de sèche justesse, de poésie incarnée ne peuvent émaner d’un cerveau occupé par les sacs à main. Comment même imaginer qu’une épure parfaitement balisée comme Iota provienne d’un être fâché avec l’orientation ? Burn Your fire For No Witness est assurément la preuve par le mâle quand la musique est bonne. Les blagues les plus courtes étant les meilleures : Angel Olsen n’est pas une femme. Ou alors Letta M’Bulu, Courtney Love, Joan Baez, le sont aussi. On m’aurait donc menti ?  

 

Hi-Five :

 

 

 

 

Forgiven / Forgotten :

 

 

 

 

Angel Olsen sera au Divan du Monde le 26 mars pour le festival Les femmes s'en mêlent.

Partager cet article
Repost0
7 février 2014 5 07 /02 /février /2014 19:00

 

anna-aaron.jpg

 

Anna Aaron - Neuro

 

En rentrant chez moi ce soir, j’ai découvert dans ma boite aux lettres un énième cd promo. Vous savez, nous, les chroniqueurs de l’actualité sommes envahis par les propositions musicales, nos greniers débordent d’offres qui ont échoué là faute d’oreille bienveillante. Parfois cela vire au harcèlement et depuis janvier je me suis vu obligé de mettre sur la pile d’attente le dernier Warpaint, Mogwai, Breton. Sont gentils, mais le temps que je dégoupille, que je peaufine un bel article inspiré et percutant, je me suis déjà fait doublé par GQ et Picsou Magasine. Vous vous rendez pas compte vous, heureux consommateurs qui économisez joyeusement vos deniers pour vous offrir le grand frisson : faire la queue dans un magasin pour vous délester de quinze euros, ou vérifier votre haut débit en créditant Itunes. Nous les bloggeurs, nous n’avons pas cette chance, que dis-je ce privilège de lire sur nos relevés bancaires : 07/02/14 : 15.99 € - Fnac-Montparnasse.

 

Une fois par exemple j’ai essayé en mettant une cagoule, d’aller acheter l’intégrale des Smiths dans un magasin de disques (pour les plus jeunes qui me lisent, c’est une sorte d’Amazon mais avec des gens en vrai). A peine franchi l’entrée que le Moz m’attendait avec trois coffrets tous dédicacés de sa patte : « Hope you enjoy ! Morissey » Vous voyez c’est chiant. Et je ne vous parle même pas des concerts : rien que ce dernier mois, j’ai dû décliner l’invit’ pour Morricone à Bercy ou Fauve au Bataclan. Des fois j’me dis : ils se rendent compte ? On se gare pas comme ça à Paris, et puis j’ai pas fini Breaking Bad moi. Je veux bien être sympa, mais bon. Faudrait qu’un jour les attachés de presse, les promoteurs web nous foutent la paix. J’en suis arrivé à un tel point que j’achète sous le manteau Stromae dans des ruelles sombres.

 

Donc quand ce soir, j’allais pour la énième fois poser le cd promo d’Anna Aaron sur le dessus de la pile, je ne sais pas ce qui m’a pris j’ai eu comme un doute : un chouette label (Discograph) un chouette visuel, et me voilà en train d’écouter Neuro sur ma nouvelle chaîne Hi-Fi (offerte gracieusement par Bose, bien entendu). Vous savez quoi ? Je crois que j’ai bien fait. A l’heure où j’écris cet article, je reconnais que même un album gratuit peut s’avérer payant. Découverte en 2011 avec Dogs in Spirit puis figurant dans la foulée sur trois titres du dernier Erik Truffaz (El tiempo de la revolucion – 2012) La bâloise Anna Aaron offre avec ce deuxième album un subtil panaché de tensions métalliques et de douceurs arrondies par l’intervalle de deux accords au piano, secondée par la voix toujours juste, pertinente de la suissesse. Les tympans fins y entendront sa comparse Sophie Hunger, des volutes de la première PJ Harvey, des réminiscences d’Agnès Obel, De Rachel Zaffira, d’An Pierlé, Zola Jesus… Certes. Peu importe. Du haut de mon piédestal qui me coûte chaque jour à devoir élire le prochain album à ouïr,  je vous préviens terriens qu’Anna Aaron, au delà d’une belle assonance, est une artiste à suivre sérieusement. Peut-être la croiserons-nous en 2014 au détour d’un grand festival (Charrues, Art Rock, Rock En Seine, Eurockéennes…) Quand vous badauds, serez chaleureusement regroupés fraternellement dans une messe à 50€ les pieds dans la boue, vous penserez alors à moi, contraint d’apprécier gratuitement la performance un verre de champ’ à la main, loin de vos bacchanales populaires. Merci pour moi. C’est pas drôle tous les jours.

 

Linda :

 

 


 

 

Ah au fait, l'album sort le 11 mars. Délai nécessaire à nos privilèges.


Partager cet article
Repost0
2 février 2014 7 02 /02 /février /2014 18:49

mutual-benefit.jpg

 

Mutual Benefit - Love's Crushing diamond (E.P)

 

Ca commence comme une chute où l’on vous prend par la main. Comme le bâillement d’instruments qui se réveillent doucement, qui se cherchent, s’harmonisent. Puis une voix fragile, délicate, se pelotonne juste à temps dans ce petit torrent qui s’ouvre. Strong River pose les bases d’un univers rétro propice à l’hibernation ou au réveil  (tout dépend de quel côté on dort) puis un réveil doré (Golden Wake) que n’aurait pas renié Youth Lagoon. Quand on entend parfois la débauche d’effets débouchant sur un pet de nonne, la surenchère qui cache un vide abyssal, on remercie Mutual Benefit d’offrir à nos oreilles une cure de mélodies limpides, d’harmonies évidentes de grâce.

 

 Mené d’une main de dentellière par Jordan Lee, Love’s Crushing Diamond fait parfois penser aux jolis bricolages de Beach House, à cette qualité commune de sucrer les notes sans verser dans le sirupeux. On pense aussi (sur Statue of a man en particulier) au talent d’écriture des grands espaces intimes d’un Radical Face. En fait si les accointances sont multiples (Owen Pallet, King Creosote, Elliot Smith, excusez du peu…) Mutual Benefit avec seulement sept titres se hisse au panthéon de tous ces ciseleurs de chansons aériennes, de ceux qui ont compris et fait leur ce credo simple mais si difficile à atteindre : Less is More. Et Love’s Crushing Diamond pourrait en être la définition. Sublime et émouvante.

 

 Golden Wake :

 

 


 


Partager cet article
Repost0
23 janvier 2014 4 23 /01 /janvier /2014 17:26

petit-fantome.jpg

 

Petit Fantôme - Stave

 

 

L’année 2014 a musicalement démarré sur les chapeaux de roues. Plein de nouvelles promesses. J’ai entendu les arguments de différents sites au taquet, noté plus de vingt références, me suis montré attentif aux nouvelles tendances. Et puis d’un coup, j’ai eu envie de repli. De cocon, de régression. A nouveau de freiner des quatre fers dans ce torrent de nouveautés toujours plus aguichantes, toujours plus efficaces, l’une chassant l’autre. Le temps ne fait rien à l’affaire : je voulais trouver un doudou accueillant, plein de bémols et de suspensions sonores, quelque soit l'année indiquée sous le verre Duralex. Un truc que je pourrais écouter sous ma couette ou mon plaid, avec des tartines de Nutella et une Game Boy, sans effort, ni projet. Un truc qui viendrait lécher mon tympan alors que l’œil mi-clos, je toiserais mollement l’espace infini de ciel gris que ma fenêtre offre.

 

L’heure est à la rébellion verticale. Je propose une insoumission horizontale. Couper maintenant toute source d’informations. Choisir le combo le plus aimable (surface+chaleur+tranquilité) et décider que l’on ne répondra pas au téléphone, aux mails, aux posts, aux tweets, aux trucs. Maintenant nous voilà seuls. Profitons de cette soirée pour ranger deux-trois trucs qui polluent votre regard sur le monde. Et puis, regagnons cet endroit qui nous sied le mieux. Tout est à portée de main ? Cigarettes, bières, vin ? Tisane, café, chocolats ? Vous pouvez maintenant lancer l’album de Petit Fantôme, Stave.

 

Bande sonore de mon année 2013, je n’ai pas pris le temps d’en faire un article, tant il s’est rendu très vite familier de mes velléités. Stave est une aubaine pour les retardataires, pour les impatients de l’actualité, pour les cotonneux comme moi qui rêvent d’avoir plus de temps pour le prendre, ce temps.

 

Merveille de la modernité, Stave, projet solo d’un membre de l’excellent François & The Atlas Moutains, est disponible gratuitement depuis des mois à cette adresse. Il suffit donc d’un bras hors de la couette, confronté à la différence de température, pour goûter cette proposition majeure de l’année 2013.

 

Il fait froid non ? Je retourne sous le plaid. Bonne écoute !

 

Peio :

 

 


 

 

 

 


Partager cet article
Repost0
18 janvier 2014 6 18 /01 /janvier /2014 12:05

81ebxpazal-_sl1406_.jpg

 

Childish Gambino - Because the Internet

 

Par un beau matin pluvieux alors que j’étais sous le patio comme un pacha à siroter un kawa en épluchant le dernier Pirelli, mon sound-system Denon aguiche mes portugaises d’une flow américain. What the fuck ? Je repose ma tasse Segafredo sur la table Ikea et m’empresse de googler l’intéressé sur le web. Putain de pop-up qui se réfléchit sur mes Ralph Vaessen. Take it easy, je checke les résultats et découvre l’univers d’un artiste bigger than life : Childish Gambino.

 

Acteur bankable de la série Community mais aussi humoriste à succès, le rappeur (As Known As Donald Glover) vient de sortir une petite bombe de hip-hop-jazz-soul-électro qui s’intitule Because the Internet . Mama Mia ! Toujours un peu has-been dès qu’il s’agit de rap, je découvre ex nihilo et sans a priori une œuvre sombre et sensuelle où un chanteur charismatique dégaine le falsetto pour mieux nous séduire. Childish Gambino n’est pas l’un de ces innombrables ersatz de rappeurs kitschs tout juste bon à illustrer la nouba glauque d’un junkie. Là, il s’agit davantage de karma, d’inquiétudes chtoniennes, de hauteurs tibétaines. Avec Because the internet, Childish Gambino livre un cantique moderne, où têtu comme un breton, il réconcilie le savoir faire U.S du Hip-Hop avec les soli du rock blanc dans un maelström jouissif. Si l’album ne décroche pas le jackpot en 2014, je me ferai volontiers Hara-Kiri. En attendant, écoutons-le ad libitum.

 

3005 :

 

 


 

 

Partager cet article
Repost0
9 janvier 2014 4 09 /01 /janvier /2014 20:02

Misteur-Valaire-Bellevue.jpg

 

Misteur Valaire - Bellevue

 

Remettons le voyage en route. Ces trois dernières semaines, nous avons été ivres de boissons, de musique, de nourritures terrestres. Et puis il nous faut enfin déplier ce corps repu de satisfactions buccales, olfactives, auditives. Nous sommes le 9 janvier et 2014 est là. Certains luttent déjà pour leurs bonnes résolutions. Beaucoup ont repris le travail, se jurant ne plus se laisser prendre au jeu fatal du foie gras qui empèse encore leurs poignées d’amour. Les sapins rachitiques s’affalent dans la rue, partageant avec nous une sacrée gueule de bois vermoulu. Puisque 2014 est arrivé, qu’allons nous faire ? Qu’allons-nous maintenant écouter ? La nouvelle année est une angoisse parce qu’on remet les compteurs à zéro et que je me suis demandé depuis quelques jours ce qui allait inaugurer ce troisième défi d’Euphonies : partager de la musique en 2014 ?

 

Alors voilà. Un album sorti fin 2013 par le groupe franco-québéquois Misteur Valaire, au joli titre (Bellevue), et qui offre l’avantage de ne pas avoir à choisir entre pop, rock, rap ou électro en ce début d’année : tout y est. Bellevue est un mélange raffiné d’influences multiples mais qui à chaque morceau touche juste. Le groupe m’avait déjà plus que séduit à l’époque de Golden Bombay et de son imparable November number 3 aux accents mélancolico-lascifs. Avec Bellevue, Misteur Valaire multiplie ses pistes à l’horizon d’une musique toujours plus métissée, énergique, déphasée. Dès l'entame Bellevenue avenue le ton est donné. Et Il suffit d’écouter le tube Don’t Get Là pour se dire que l’électro généreuse a de beaux jours devant elle. Rock, frondeur, direct, le titre va comme une fusée amphétaminée à l'essentiel. Et, remarque importante, l’album ne connaît par ailleurs pas de coups de mou : certains épidermiques n’aimeront certes pas les incartades vers un rock digital et épique (Moutains of illusions, El Kid) alors que c’est là que se joue le nœud de la renaissance pour Misteur Valaire : l’impression d’entendre un groupe d’artistes libres, sûrs de leurs méfaits. Rien de mieux pour commencer une année 2014 musicalement prometteuse.

 

Bellevue Avenue :

 

 


 

L'imparable tube Don't get là :

 

 


 

Et le fameux November number 3 :

 

 


 
Partager cet article
Repost0
12 décembre 2013 4 12 /12 /décembre /2013 18:13

600148-nick-cave.jpg

 

Nick Cave & The Bad Seeds - Live From KCRW

 

Il y a quelques jours, j’ai commandé sur internet le dernier album live de Nick Cave & The Bad Seeds : KCRW Sessions, après le sublimissime Push The Sky Away sorti en début d'année.  Le facteur laisse hier matin un avis de passage dans ma boîte aux lettres parce que bon, s’enquérir de ma présence à cette heure là en montant 18 marches d’escalier (oui, oui j’ai compté) faut pas non plus croire au Père Noël. Mais moi j’étais là hein, levé aux aurores pour accueillir le cadeau, le présent du divin prêcheur. Sur le papier postal, il était écrit que je pouvais retirer mon colis dès l’après midi. Prenant mon mal en patience, je me parai de mes plus beaux atours pour délivrer la galette sacrée du tout-venant encartonné dans les circuits encombrés du centre de tri pollué par les bacchanales chrétiennes de la consommation. A l’entrée, le cerbère engoncé dans une polaire siglé, après m’avoir demandé de décliner mon identité (étais-je bien le vrai fan de Nick Cave qui avait passé la commande ?) déçut toutes mes espérances en m’informant que le précieux était captif d’un réseau complexe. Nick Cave outragé, Nick Cave scanné, Nick Cave martyrisé, mais Nick Cave, je te libérerai !

 

Le lendemain, à l’heure où blanchit la campagne, je suis revenu. Vois-tu Nick, je sais que tu m’attends. J’irai par le parking, j’irai par le guichet, je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps. Enfin, il était là. Encore empaqueté, scellé, plastifié, mais il était là ! De retour dans ma cabane, je posais l’objet de toutes mes convoitises sur ma table comme délicatement on dépose l’hostie sur la langue d’un jeune croyant. D’abord organiser l’espace de la cérémonie. Favoriser l’harmonie Ikea, créer le Feng-Shui de l’écoute. Enlever, déplacer, nettoyer, paralléliser. S’assurer qu’aucun son parasite ne viendra entacher le premier frémissement de mon tympan. On n’imagine pas une messe donnée près d’un Lunapark ou d’un concours de tuning.

 

Alors, et seulement, procéder au strip-tease de l’élu. Dans un silence monacal, déchirer la membrane protectrice, caresser sa peau cartonnée, sentir sa fragrance vinylique puis enfin, dans une hésitation, l’ouvrir. Découvrir alors des visuels jusqu’ici cachés, de nouvelles promesses. De mes doigts purs et lavés à l’extrême-onction (oui l’heure est grave), oser prendre en main le Saint-Graal, s’assurer qu’il n’a pas de défauts, en contempler les sillons, la noirceur. Se lever alors, et de façon solennelle, l’introduire sur le plateau. Souffler sur sa surface par superstition. Ecouter le délicieux cliquetis de l’entraînement par courroie. Entendre le craquement des premières secondes et se dire que, là, oui, ça a du sens. Parce que la musique de Nick Cave est aussi hypnotique qu’un craquement de bûche sur le seul feu d’un foyer perdu dans une forêt enneigée.  

 

Après c’est l’oreille. Le point de vue. La perspective. « Nous voici encore seuls. Tout cela est si lent, si lourd, si triste… » Après c’est Nick Cave. Je l’écoute. Plus de mots.

 

 

 


 

 

Partager cet article
Repost0
19 novembre 2013 2 19 /11 /novembre /2013 19:43

San-Fermin-San-Fermin.jpg

 

San Fermin - San Fermin

 

Tous les ans c'est pareil : alors qu'on pense avoir fait le tour des sorties importantes, que le palmarès de fin décembre est quasiment déjà bouclé, qu'enfin on va pouvoir se consacrer à d'autres sujets trop délaissés jusque là ( scrapbooking, origami, finale du championnat d'échecs Anand/Carlsen), voilà qu'un empêcheur de glander en rond pointe le bout de son museau taurin. Son nom, San Fermin.  Et vous savez quoi ? San Fermin énerve. Pour plusieurs raisons que je vais me faire un plaisir de lister ci-dessous.

 

1. San Fermin énerve d'abord par son nom.  Après avoir passé des heures sur internet à trouver un lien logique entre un groupe de Brooklyn et les fêtes de Pampelune,  je dépose les armes. Ainsi va le monde : je propose qu'à partir d'aujourd'hui on choisisse son nom d'artiste dans un je-m'en-foutisme manifeste. Toi, jeune groupe de Death-Metal tu t'appelleras "Magellan". Toi précoce chanteur à texte, "Doliprane" sera ton nom. Toi, sauvage formation de batucada, baptise-toi "Bildungsroman". N'ayez crainte, on n'en a plus rien à foutre.


2. San Fermin énerve ensuite par sa musique. J'imagine la détresse d'une espèce en voie de disparition, le disquaire de la Fnac, transpirant et fébrile, dès lors qu'il faut ranger l'album dans une catégorie. San Fermin est à ce titre un ovni générique, qui parcourt le large spectre de la pop, depuis la ballade immédiate jusqu'aux confins de l'expérimentation sonore. D'un titre à l'autre, s'entrechoquent les  emprunts, les allusions, les références. Il y a du jazz, du progressif, de l'outrancier, du minimal, de la symphonie et de la sonate, du rock à gauche à droite, des choeurs lyriques, des progressions épiques, des villégiatures du côté de Sufjan Stevens ou Rubik pour les arrangements, un grain de voix masculin qu'on jurerait piquer à Matt Berninger de The National (mais le leader c'est le pianiste), une espèce de bordel mélodique savamment contrôlé par l'incroyable maturité d'un groupe aux multiples facettes.

 

3. Mais en définitive, San Fermin énerve surtout par son incroyable beauté, son équilibre protéiforme qui ne semble jamais calculé. L'album peut donc s'apprécier en toutes circonstances, en soirée entre amis, en slip sur une banquise, à dos de chameau, dans un studio new-yorkais, saoul sur une plateforme pétrolière, en été, en hiver, sur une planche de fakir, pour un mariage ou des obsèques, coincé dans un ascenseur avec des critiques de jazz, près d'une cheminée, d'une payotte, lors d'une Peña de Pampelune ou pendant la dictée de Pivot. Encore plus fort, des titres comme Renaissance, Sonsick, Torero, ou The Count raviront les popeux puristes, les illuminés du rock progressif, les foufous du baroque, les extrémistes du jazz expérimental, les rois de la contemplation, les agités du rock, les psychopathes du radicalisme, les néophytes du la-mineur.

 

San Fermin vient d'inventer un nouveau genre : la musique globale, tentaculaire, polyvalente. Alors oui c'est énervant. Mais cela fait vachement de bien.

 

L'irradiant Sonsick :

 

 

 

 Renaissance :

 

 


 

 

Partager cet article
Repost0
10 novembre 2013 7 10 /11 /novembre /2013 14:13

ii.jpg

 

Unknown Mortal Orchestra - II 

 

Que les dieux du Solfège Miséricordieux me pardonnent : aurais-je oublié de parler de cet album ? Dans une course effrénée après l’immédiate actualité, aurais-je commis l’outrage de zapper une grande œuvre de 2013 : II d’Unknown Mortal Orchestra ?  La consultation de mes archives est formelle : zéro mention, aucun article. Bon vous savez quoi ? On fait comme si de rien n’était.

 

Vos paupières sont lourdes. Vous vous détendez et au loin, paisiblement, parvient le son d’une musique familière, réconfortante. Alors que vous nagez dans une bulle cotonneuse où plus rien n’agresse, où vous reprenez possession de votre corps et de vos émotions, des bribes d’accords, une voix comme au lointain s’emparent de vous. Vous êtes bien. C’est d’abord une chaleur, une suite d’arpèges où le doigt glissant s’entend sur la corde. Puis le chœur divin de From the Sun. Et très vite, c’est les Beatles qui résonnent, comme si Lucy In The Sky With Diamonds voulait vraiment dire LSD, une ouverture vers les paradis artificiels. La musique d’Unknown Mortal Orchestra flotte dans l’air comme une vapeur de cigarette analogique. D’aucuns trouveront la similitude avec le Fab Four trop marquée. (Vous avez déjà oublié l’absence de chronique sur le site…) Ce serait aller vite en besogne : Dès le programmatique So good at being in trouble c’est plutôt le chaloupé d’un vieux standard soul qui embrume votre regard. Vous êtes le dernier client d’un tripot enfumé et vous ressassez ces paroles :

 

Now that you’re gone
It’s been a long lonely time
It’s a long, sad lonely time
Rolling along, I'm in a strange state of mind
It’s a strange old state of mind

 

Sans doute l’une des plus belles chansons sur le « bonheur d’être triste » comme disait Victor. (Souvenez-vous Euphonies a été le premier à en parler). Puis vous n’avez pas encore eu le temps de finir votre dernier verre que One at the time réveille d’une wah-wah toute hendrixienne la fièvre psyché qui est en vous : votre veste est en daim et vous déclamez du William S. Burroughs. Vous êtes en mon pouvoir, (Tous mes articles ont parlé d’Unknown Mortal Orchestra) et maintenant vous reposez lascifs sur un canapé en croûte de bison l’oreille anesthésiée au son de No need for a leader. Les sinusoïdes sonores de Monki  prennent le relais et vous êtes cette pochette de Love Forever changes. Vous écouterez souvent II en pensant à moi. Au clair de lune ou par une nuit sans astre. (Euphonies is watching you). Et vous m’adorerez. Parce que je suis Unknown Mortal Orchestra. Vénérez-les, vénérez-moi.

 

 

From the sun :

 

 


 

 

So good at being in trouble :

 

 


 
Partager cet article
Repost0

Présentation

  • : Euphonies
  • : Musiques surtout, d'hier et d'aujourd'hui. Au gré des envies et des découvertes.
  • Contact

Playlist Le Bout du Monde

Recherche

Dans ma cabane une platine

Ebuzzing

http://labs.ebuzzing.fr

En boucles d'oreilles

1. Scott Matthews - Unlearned

2. Har Mar Superstar - Bye, bye 17

3. Junip - Junip

4. Nick Cave & The Bad Seeds - Push the sky away

5. Aline - Regarde le ciel

6. Fauve - e.p

7. Bumpkin Island - ten thousand nights

8. Hot Chip - In Our Heads

9.Bertand Belin - Parcs

10.Stromae - Racine Carrée

Et pour quelques titres de plus...

Suivez-moi sur Spotify

Extension du domaine...

Paperblog